Les Grecs à Marseille : minorité ethnique ou nation en diaspora ?
Dans un ouvrage précédent, nous nous étions attaché à retracer le parcours de ces Grecs qui s'installèrent à Marseille au XIXe siècle et à disséquer les mécanismes de leur fixation communautaire qui a abouti à ce modèle identitaire si spécifique : ni assimilation ni ghettoïsation.
Mais comment alors qualifier de façon collective ces Grecs ? colonie-minorité ethnique qui a importé à Marseille, depuis ses territoires de provenance (Chios, Constantinople...), les propriétés de sa reproduction sociale ? ou nouvelle excroissance d'une nation hellénique en diaspora ?
D'un côté, immergée au sein de la société locale, la colonie serait vouée à adopter ses normes et modes de comportements, transformant ainsi, au bout de quelques décennies, ses propres codes en simples rappels symboliques. De l'autre, en tant que groupe en diaspora, elle maintiendrait des liens d'appartenance à la nation grecque. Mais de quelle nation s'agit-il ? celle de l'Orient hellénisé de longue date ou celle représentée par l'État grec de 1830 ?
À partir des résultats de l'enquête sociodémographique menée pour la toute première fois sur la population grecque de Marseille, se profile l'exigence de penser le groupe phocéen sous l'angle d'une conscience nationale hellénique sans centre émetteur et portée par la Communauté. En effet, cette dernière n'est pas rattachée à une quelconque mère patrie, mais connectée au réseau des Communautés historiques de l'hellénisme. Grâce à ce maillage organisé par delà les Etats, l'entité marseillaise s'identifie à la nation panhellénique, s'appuie sur son réseau d'héritages mémoriels et contribue à les co-construire et les ré-élaborer.
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