Les couleurs étaient là quand le langage les nomma : couleur du temps, couleur des mots. Existence énoncée n'implique pas pour autant essence élucidée ; "par le pouvoir des mots", la couleur est née, une seconde fois. Mais "sous couleur de" s'y montrer, elle s'y est cachée : "couleur" a connivence avec "celer". Naissance-annonciation et naissance parodique : le Moyen Âge s'illustre des couleurs que son langage, à la lettre coloré(e), recèle ; mais sous ce langage qu'elle répète et où elle se répète pour la plus grande "exultation de l'œil" la couleur se dérobe. Ce jeu présence-absence, sous le sceau médiéval du secret et du sacré, participe d'une hiérophanie qui est bien loin d'exclure une histoire des couleurs, elle-même indissociable d'une poétique de la couleur. Les couleurs au Moyen Âge - celles du peintre et celle du poète, celles du poète-peintre - tranchent, franches et nettes, le plus souvent sans nuance ; elles brillent aussi, compactes et lisses, d'un vif éclat ; elles opposent bien autant qu'elles s'opposent entre elles. De l'œil au mot, s'instaure un divorce qui est aussi complicité où la couleur-énigme pourrait être à la fois le masque et le philtre.
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