L'enfance de la ville, c'est le jeu que produit, dans l'espace urbain, la
résurgence inopinée de figures matricielles : fragments de village, jeux
de miroirs, zones interstitielles. C'est l'intermonde dont parle Kafka,
figure du passage et de la métamorphose, paysage primitif où ne
cessent de se reconfigurer le fond pulsionnel et ce que Benjamin appelle
«l'inconscient du collectif».
La ville est ce milieu où la technique se révèle un jeu héraclitéen avec la
nature, où la préhistoire se noue à l'histoire, le plus archaïque au plus
moderne. C'est l'enfant qui saisit le mieux la vie de cet intermonde :
placé entre un héritage qu'il ne sait pas comment recevoir et la difficulté
à saisir ce qui se dessine, il opère un travail symbolique qui esquisse le
visage d'une architecture qui vient, en tournant les yeux vers un monde
qui disparaît.
Mais ce sont aussi les lectures que Benjamin consacre aux Surréalistes -
Aragon et Breton -, à Proust, Baudelaire et Brecht, et ses propres essais
dédiés aux villes qu'il a traversées, qui sont analysés ici comme autant
de seuils nous invitant à une pensée et une pratique politiques de la ville.
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