Longtemps perçue avec méfiance, la bande dessinée a depuis gagné sa place dans les bibliothèques, les écoles, les musées, les galeries... Si elle a obtenu de haute lutte le statut de « neuvième art » en France et en Belgique, c’est notamment grâce à une nouvelle génération d’auteurs, aux cercles bédéphiles et même, en France, grâce à l’État. Toutefois, son entrée au panthéon des arts est aussi le fruit d’une mutation décisive dans les circuits de diffusion. Pendant des décennies, la bande dessinée est restée un produit de presse et l’album, quant à lui, était tout au plus un produit de luxe. Mais dans la deuxième moitié du XXe siècle, le marché de l’édition se transforme en profondeur, et bascule de l’univers de l’illustré vers celui du livre. Cet ouvrage explore ce passage de la presse à l’album, et montre comment ce processus affecte les manières de créer, de transmettre et de lire la bande dessinée. L’album transforme les métiers du dessin, bouleverse les manières de raconter en images, et contribue au sacre de l’auteur. Il confère à la bande dessinée une respectabilité ; il la dote, également, d’une mémoire, forgeant peu à peu un canon des littératures dessinées. L’identité de la bande dessinée franco-belge ne tient-elle pas au rôle central de l’album ? Ce format, si banal en apparence et pourtant si singulier à l’espace franco-wallon, participe à l’émergence d’une nouvelle culture graphique.
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