Le refus affiché de l'ambiguïté des discours, la condamnation quasi unanime des équivoques et autres doubles ententes susceptibles de mettre en cause l'efficacité d'une communication souhaitée transparente et par là pleinement efficace, constitue un de ces consensus sur lesquels s'appuient les sociétés pour construire leur légitimité. La France de l'Ancien Régime, grammairiens, rhétoriciens, académiciens en tête, a rêvé éperdument de clarté et les révolutionnaires, loin de le rejeter, ont poussé ce désir jusqu'à un point d'incandescence dont la littérature ne devait plus se remettre.
Héritiers de cet amour dont ils ont pu mesurer toute la puissance mortifère, les romantiques français (Nodier et Stendhal en tête) redécouvrent douloureusement la nécessité poétique de l'ambiguïté, la puissance signifiante de ce qui se joue de vrai dans l'insoumission aux règles orthographiques ou grammaticales, aux modèles textuels, aux figures jusque là reconnues du sublime. Leur prise en compte désenchantée de résistances fondamentales de la langue les conduit à réinventer, non sans réticence, le vague pour en nourrir leur modernité autant que la nôtre. Au moment où l'ambiguïté a acquis l'omnipotence que l'on sait dans le domaine critique, il semblait nécessaire de tenter de saisir les formes de ce bouleversement.
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