Entre 1941 et 1956, le poète haïtien Magloire-Saint-Aude (1912-1971) publie trois minces recueils de poèmes - Dialogue de mes lampes, Tabou et Déchu - et fonde la modernité poétique haïtienne. L'hermétisme de ces courts textes déroutera et embarrassera plus d'un, mais leur grande qualité a, plus d'une fois depuis, fait «arrêter le passant». Cet essai se propose comme point de départ de questionner cette opacité du texte saintaudien, sans qu'elle constitue un obstacle irrémédiable à toute lecture, ou, au contraire, qu'elle soit complètement évacuée.
L'opacité dans le geste de la compréhension - qui est un paradigme développé par Edouard Glissant - sera abordée à travers la subjectivité, l'espace et l'altérité entendus comme des figures du sujet. Trame complexe qui ne se tend que pour mieux se défaire, le sujet est le moyen par lequel l'opacité se met à l'œuvre dans la poésie elliptique de Magloire-Saint-Aude. Sa triple figuration - subjectivité, espace et altérité - fait de lui un «chaos-monde» : une instance qui dans le péril et la précarité va risquer la solitaire parole du «je» dans ce qui se révélera être une véritable poétique et esthétique de l'opacité.
Mais, la «jactance du poème» est-elle l'espoir des hommes ? Dit-on impunément «je» quand on est un écrivain haïtien ?
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