A Friedrich Theodor Vischer (1807-1887), philosophe posthégélien, critique littéraire prolixe et auteur d'un singulier roman sur l'éternuement dans l'histoire universelle, on doit surtout une tentative de présenter un système esthétique exhaustif, la plus ambitieuse de tout le XIXe siècle allemand. Certes il se situe dans la postérité de Schelling ou de Hegel, mais l'attention portée à des phénomènes comme le comique ou le sublime, auxquels ses prédécesseurs avaient tant de peine à trouver une place adéquate, fait de son esthétique un système prêt à se disloquer pour laisser la place à une étude des modes de perception et à une véritable histoire de l'art. Dans un choc indécis dont les aspects ironiques ou comiques ne cachent pas la volonté de rupture métaphysique, l'esprit absolu se heurte désormais à la contingence et à la perfidie des objets. Avec Vischer, qui renoue avec la lignée des philosophes attentifs à ce que pense la littérature, les tendances spéculatives de l'esthétique propre à la philosophie classique allemande semblent atteindre leur limite et basculer dans l'approche psychologique des phénomènes artistiques dont se réclamera un Wölfflin. Or le noyau de cette œuvre charnière se situe clairement dans le bref ouvrage sur Le sublime et le comique qu'une évocation préalable du parcours de Vischer depuis le séminaire de théologie de Tübingen jusqu'à l'enseignement de l'esthétique en passant par les engagements politiques libéraux de 1848 permet de situer dans une histoire intellectuelle globale de l'Allemagne posthégélienne.
Jamais traduit en français, Friedrich Theodor Vischer est pourtant une référence indispensable à la compréhension de ce que le XIXe siècle allemand a apporté en matière de réflexion sur l'art comme philosophie sensible.
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