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Philosophe et professeur, Amédée Ponceau fait penser à Alain par son œuvre "parlée", qui est considérable ; il s’apparente aussi à Simone Weil, par sa méditation silencieuse, enfermée dans des notes intimes qui ne furent publiées qu’après sa mort et dont l’importance est bien plus considérable encore. « L’initiation philosophique » paraît quelques mois avant son décès, en 1948. Ses autres œuvres ne sont publiées qu’après « Timoléon », « Réflexions sur la tyrannie », « Paysages balzaciens », « La musique et l’angoisse », « Le temps dépassé ». Pourquoi ce long silence ? C’est à cette question que répond Roger Bodart. Il le fait après avoir dépouillé des notes encore inédites, dont il donne de larges extraits. On y trouve un homme qui tend moins à s’ébruiter qu’à se transmettre, qui regarde les hommes, mais ne veut pas être vu par eux. De nombreuses pages de ce livre frappent par leur actualité. « L’éclair d’Hiroshima » et, plus loin, « Un songe pour détruire le monde » éclairent d’une façon nouvelle le problème redoutable des pouvoirs de l’homme de science. « Nationalisme et humanisme » et « Une carrière d’opposition » posent, avec franchise, le problème de l’homme devant l’État. Toute l’angoisse du monde d’aujourd’hui est présente dans ces pages. Non seulement l’angoisse : Amédée Ponceau est une âme accordée au Grand Concert des êtres et des choses. Le livre se clôt sur un chapitre, "La paix du cœur", qui livre son ultime secret. « Être âme, disait-il, ce n’est pas seulement assister à soi-même, c’est assister à sa propre naissance, à la naissance du monde. » Et il ajoute : « L’Histoire n’est-elle que la voix des morts ? Ce gouvernement des vivants par les morts, dont parle Auguste Comte ? N’est-elle pas aussi la voix de Dieu ? N’y a-t-il pas une idée qui dépasse toute l’Histoire, et qui est la forme préfigurée de ce que doit être l’avenir ? C’est la réponse au risque du désespoir. » L’œuvre d’Amédée Ponceau a sauvé beaucoup d’hommes du désespoir. Roger Bodart est le premier a éclairer le visage de ce sage, dont la pensée rend quelque force à notre monde « désâmé ».