«La politique jalouse des souverains Médicis fut cause d'un
grand vide dans notre histoire» : l'indignation manifestée
par Anton Filippo Adami en 1756 met en lumière l'un des
éléments les plus intrigants du règne des grands-ducs Médicis au
XVIIe siècle : la disparition de l'histoire. Où le temps de la commune
florentine avait été caractérisé par une profusion de récits mettant en
scène l'histoire de la patrie, le principat des grands-ducs, issus d'une
branche cadette de celles des glorieux ancêtres - Côme l'Ancien et
Laurent le Magnifique - font des res facta un récit tabou.
Où trouver l'origine de ce «vide» ? Doit-on l'attribuer au statut
inédit des Médicis dans l'Europe des princes ? En effet, comment
une famille de banquiers, nés sous la République, faits ducs à l'issue
d'une guerre contre leur propre patrie, aurait-elle pu se doter d'une
histoire dynastique satisfaisante ? La «raison d'État» a-t-elle, par
une censure efficace, cherché à protéger et à construire le secret de
la famille au pouvoir ? Mais comment expliquer, alors, la frénésie de
copie et de recherche d'archives concernant la période républicaine
qui s'empare au même moment des patriciens florentins, sans que
le pouvoir s'en inquiète ?
Ces questions sont au coeur d'une enquête où la Florence baroque
apparaît peu à peu comme «hantée» par les grands spectres
républicains.
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