Le marquis de Villa Rica a surpris sa jeune épouse en train de
faire l'amour avec un professeur de piano d'origine italienne. Son esprit
fantasque le pousse à commander la reproduction, grandeur nature et
modelée dans la cire, de cette scène honteuse qui marquera sa déchéance.
Voilà la petite histoire, plutôt comique, à travers laquelle Jorge Edwards
fait une prodigieuse caricature d'un siècle où, partout, se sont mis à
pousser d'invisibles murs de Berlin et des ponts infranchissables.
Le romancier ne s'en tient pas à la simple anecdote érotique, qui
pourtant exprime si bien les peurs et les fantasmes d'une classe sociale en
perte de vitesse, mais il conduit de main de maître un récit, où le burlesque
"enfle" jusqu'à se transformer en un humour sinistre d'une stupéfiante
efficacité, sur le véritable changement de pouvoir dans le monde.
L'humour grinçant de Jorge Edwards, dans ce conte, cette fable ou
cette allégorie, se joue de notre curiosité. Est-ce bien du Chili qu'il
s'agit ? Et le marquis, sa jeune et belle épouse, le prof de piano bellâtre
et l'inquiétante Cuisinière qui prend les choses en main n'ont-ils fait
que traverser nos rêves, tels des fantômes grimaçants ?
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