Le cinéma des années d’Occupation est l'ultime refuge des Français en mal d’évasion. Au cœur de la pénurie, il les transporte dans un monde d’abondance. Ici, apparemment point de pénurie, point d’« ersatz », de gazogène ou d’uniformes vert-de-gris. Les agapes se succèdent et des superproductions dignes des temps de pléthore voient le jour. En ces années noires, le spectateur semble avoir retrouvé son cinéma d’avant-guerre. L’envers du décor est surprenant. Chaque mètre de pellicule suppose un véritable tour de force. Il faut louvoyer entre la censure allemande et la censure puritaine de Vichy. Sur les plateaux de la misère, il faut recourir au système D pour faire surgir le moindre décor, récupérer le moindre morceau de bois, créer le métier de récupérateur de clous, tourner par des températures sibériennes en grand décolleté, prendre un bain de soleil par dix degrés au dessous de 0 et sucer des glaçons avant d'ouvrir la bouche pour éviter qu'un nuage de condensation ne s'échappe de la bouche pendant la déclaration d'amour... Ce livre, qui retrace également la vie quotidienne du spectateur, montre des cinéastes et des acteurs choyés du public mais aussi précipités dans les affres de l'Occupation et parfois livrés aux sirènes de la collaboration. Historien des mentalités, directeur de recherche honoraire au CNRS, Pierre Darmon a puisé dans un important fonds d’archives, dépouillé toutes les revues cinématographiques de l’époque d et plusieurs livres de souvenirs. Il nous restitue ici un tableau de mœurs de la plus haute précision.
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