Le poème de Pascal Boulanger est sur la page, avec son titre,
souvent sa dédicace, comme un tableau de chevalet qui, à
travers les noirs et les trouées lumineuses, souhaite créer un effet-abîme.
Et il nous pose ces questions : comment poursuivre son existence
en refusant les rythmes violents de l'Histoire ? Comment se
libérer de la temporalité et de la mondanité tout en étant soucieux
d'un monde pris dans sa part d'abjection et de gloire ?
À travers cette suite de poèmes, Pascal Boulanger poursuit son
questionnement sur notre temps, celui du Dieu en retrait et celui
de la détresse. Mais l'expérience du défaut de Dieu n'est pas celle
de sa radicale absence. Marqué par les travaux de Léon Chestov, de
Nicolas Berdiaev ou encore de René Girard, Pascal Boulanger
affirme que le présent du poème doit soutenir ce deuil et tendre,
dans la tension de la pensée, vers une possible espérance.
Dans un monde qui semble espérer contre la beauté des
choses, c'est une métaphysique de l'exil et du refus qui se dessine ici.
Mais la mise en scène du négatif n'est pas elle-même le négatif
puisqu'elle tente de le traverser et de le dépasser en faisant du moindre
fragment de l'univers un éveil au sens et aux sensations.
La figure du Christ, souvent présente, renvoie aussi bien aux
leçons d'agonie qu'à la gloire vibrante du jour car rien n'est plus
beau - comme le dit la phrase de Kierkegaard placée en épigraphe
- que la promesse de l'impossible.
Si le poème est l'invention d'une autre scène que celle des
convulsions sans fin du monde, la fresque proposée dans ce livre
dévoile les paradoxes et fait entendre les déchirures et les impasses
de notre époque. Cette scène n'en montre pas moins la merveille du
simple, le surgissement de l'inattendu et la grâce d'un présent qui
s'offre dans sa présence.
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