Nous sommes au commencement d'un monde. Vécu dans la crainte,
ce prodigieux surgissement signe la disparition de l'ancien
monde, celui dans lequel nous sommes nés. Pourtant, la sourde inquiétude
qui habite nos sociétés doit être dépassée. Le monde «nouveau»
qui naît sous nos yeux est sans doute porteur de menaces mais plus
encore de promesses. Il correspond à l'émergence d'une modernité radicalement
«autre». Elle ne se confond plus avec l'Occident comme ce fut
le cas pendant quatre siècles. Une longue séquence historique s'achève
et la stricte hégémonie occidentale prend fin. Nous sommes en marche
vers une modernité métisse.
Deux malentendus nous empêchent de prendre la vraie mesure de l'événement.
On annonce un «choc des civilisations», alors même que
c'est d'une rencontre progressive qu'il s'agit. On s'inquiète d'une aggravation
des différences entre les peuples, quand les influences réciproques
n'ont jamais été aussi fortes. Le discours dominant est trompeur. En
réalité, au-delà des apparences, les «civilisations» se rapprochent les
unes des autres. De l'Afrique à la Chine et de l'Inde à l'Amérique latine,
Jean-Claude Guillebaud examine posément l'état des grandes cultures
en mouvement, pour décrire l'avènement prometteur - et périlleux -
d'une véritable modernité planétaire. Ce rendez-vous pourrait connaître
des revers et engendrer des violences. Il est pourtant inéluctable et sans
équivalent dans l'histoire humaine.
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