«Les immobiles mosquées, que les siècles ne changent
pas [...], elles sont l'immuable passé ces mosquées ;
elles recèlent dans leurs pierres et leurs marbres le vieil
esprit musulman [...], elles font planer le frisson des vieux
souvenirs, le grand rêve mystique de l'Islam...» écrivait
Pierre Loti en 1890, lors de son retour à Constantinople.
Il en est ainsi de maints voyageurs étrangers, saisis par
ce charme de l'Orient, «le pays de l'imagination, la terre
du merveilleux» (Lamartine).
Giovanni Curatola retrace la lente progression
et la complexe constitution d'un peuple qu'illustrent
ses réalisations architecturales et artistiques, sur près
d'un millénaire : du XIe siècle (victoire de Manzikert,
en 1071) jusqu'à la fin du XIXe qui parachève l'urbanisme
d'Istanbul. Au long de ces siècles, l'activité édificatrice
et artistique des souverains seldjoukides puis ottomans
fut d'une richesse inégalée.
Les caravansérails seldjoukides - à Konya, Kayseri,
Sivas, Erzurum ou Nigde - comme les madrasas ou les türbe
funéraires, témoignage d'un passé nomade, frappent par
leur hiératique élégance et la richesse ornementale de leurs
portails qui culminera dans ceux de Divrigi, chef-d'oeuvre
«baroque».
L'arrivée au pouvoir des Ottomans, au début du
XIVe siècle, fait suite au lent déclin de la dynastie seldjoukide.
Leur expansion marque un tournant dans les arts : les églises
byzantines sont converties en mosquées puis de nouveaux
édifices religieux émaillent peu à peu l'empire selon le plan
en T renversé, typique de Bursa, qui sera vite prédominant,
comme dans la Yesil Camii (v. 1420). L'architecture ottomane
connaît son apogée au XVIe siècle avec la figure de Sinan dont
les mosquées, une fois dépassé le modèle de Sainte-Sophie,
rivalisent de beauté, sculptant la silhouette de
Constantinople ou d'Edirne, telle la Selimiye, sa plus haute
réalisation. Après l'époque de Sinan, trois constructions
palatiales majeures sont à retenir : Topkapi Sarayi,
le palais d'Isak Pasa à Dogubayazit, aux extrêmes confins
de l'empire, et Dolmabahçe, dans la capitale... sans oublier
la fontaine d'Ahmed III, «joyau de marbre» (De Amicis),
palais, mosquées, tours d'horloge et le pont de Galata.
Le prestige des sultans ne se manifeste pas seulement
dans les monuments : grâce aux ateliers impériaux, leur
mécénat favorise les arts décoratifs - calligraphie, reliure,
métaux, céramiques, tissus, tapis, bijoux, miniatures -,
indissociables de l'architecture. L'extrême beauté des
revêtements pariétaux qui ornent l'intérieur des édifices
religieux ou civils, mais aussi le mobilier des mosquées,
les mihrabs et les minbars ouvragés, sont ainsi mis en
perspective dans cet ouvrage à l'iconographie foisonnante.
La proximité entre Orient et Occident, où les différents
arts n'ont cessé de s'interpénétrer, et l'égal raffinement des
deux cultures sont ici manifestes, témoignant d'un langage
artistique méditerranéen et universel. «Cette cité - écrivait
Nerval à propos de Constantinople - est le sceau mystérieux
et sublime qui unit l'Europe à l'Asie.»
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