L’arbre grandit et grossit, dépérit, brûle ou casse (on l’a encore constaté en janvier 2009 dans le Sud-Ouest de la France). Ces phénomènes reflètent le nombre des années ou la colère des cieux. Voilà 400 millions d’années qu’il démontre ses capacités évolutives. Il connaît le sort de tous les vivants : l’éloignement des anciens conditionne le développement des jeunes – leçon de tout temps difficile à admettre. Mais si les individus meurent, l’espèce demeure.
Pourtant, inerte, l’arbre semble immuable, immortel même. Son espérance de vie excède celle des hommes et des animaux. Comment imaginer qu’un sujet si familier puisse disparaître ? Comment ne pas honorer un individu très vieux ? Comment ne pas lui attribuer des pouvoirs extraordinaires ? Comment ne pas conserver, parfois à tout prix, ce témoin de notre existence ? Il la rappellera peut-être lorsqu’elle sera éteinte.
Jadis, les arbres furent des dieux ou des messagers. Naguère, ils fournissaient de quoi soulager les gens souffrants, combattre les maladies, éviter le malheur, obtenir le bonheur. Hier encore, en plantant un arbre, l’homme célébrait la naissance et le
mariage ; il espérait la prospérité de la famille et la tranquillité de l’au-delà. Mais aujourd’hui, victimes des pollutions et des déboisements, les arbres n’écartent plus tous les maux de la terre : ils les dévoilent.
Sans conteste, l’arbre est un objet d’histoire fascinant. Cette histoire-là, trop mal connue du public, réserve des surprises
innombrables et est souvent plus prenante que celle de beaucoup de personnes ou de collectivités humaines.
Directrice de recherche au CNRS, présidente du Groupe d’histoire des forêts françaises (GHFF), spécialiste de l’histoire des forêts et de la place du bois dans la civilisation occidentale, Andrée Corvol a déjà publié, chez Fayard, en 1987, L’Homme aux bois. Histoire des relations de l’homme et de la forêt (xviie-xxe siècle).
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