L'amitié chez Aristote : une mesure de l'affect
L'éthique d'Aristote, si elle s'offre comme le premier volet supposé d'une philosophie relative aux affaires humaines, ne semble pas devoir se refermer sur une normativité assignable du juste et du vertueux. Et la phronèsis, invoquée par Aristote, au début du livre VI, comme ce qui devrait lever toutes les obscurités héritées des livres précédents, n'achève pas la détermination des conditions de la vertu ni celles de sa production. Il se peut en revanche que les livres VIII-IX, consacrés à la philia, qui pourrait n'être considérée que comme l'une des vertus particulières dont Aristote dresse les portraits, compensent ce risque d'inachèvement de l'éthique, en instaurant, à l'intérieur même d'une structure dyadique (puis communautaire) particulière, la solution substitutive, esquissée, mais aussi affective, d'un problème que l'approche théorique ne résout pas. Ce faisant, Aristote introduirait dans la philosophie les formes du rapport à l'autre, selon une double direction : celle de l'amitié - et de la nécessaire ouverture de la monade vertueuse à la présence de l'autre, perçu comme un parent familier (un oikeion), faisant ainsi de la philanthropie reconnue la source originaire d'une anthropologie, et celle, méthodologique, de la plasticité des discours, écritures, modalités épistémiques, de tout ce qui cherche à dire l'autre, pris entre l'étrange et le familier (seconde application de l'oikeion).
Une démarche qui légitimerait doublement le recours à l'affectivité, dans la constitution des modalités d'une éthique praticable et véritable, et dans la reconnaissance de l'affinité de tout discours, texte, écriture, à son objet, pour que soient conjointement pensés le flottement du monde et l'errance dans sa diversité.
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