En un peu plus de trois décennies, des années 1880 à la Première Guerre mondiale, l'affiche a révolutionné l'art. Elle a aussi révolutionné la ville. La rue est devenue un musée de peinture, résume Lautrec - et de peinture moderne. Car l'affiche, plus mobile que le tableau, en forme aussi l'antithèse. Son esthétique du choc exige des effets de surfaces, affectionne les couleurs saturées et raffole de la ligne explosive : c'est le fameux coup de fouet qu'un Chéret fait claquer dans le ciel de ses images publicitaires. À la suite de ce génie un peu oublié, Grasset, Mucha et Lautrec donnent au médium ses lettres de noblesse, au sens vrai.
La reconnaissance de l'affiche fut ainsi l'un des combats de l'Art nouveau, ce mouvement européen, pétri de sources médiévales et d'élégance japonaise, qui proclame la sortie de l'historicisme en matière de décoration, et tente d'abolir la hiérarchie traditionnelle entre arts mineurs et arts majeurs. Partant de France, l'affiche gagne le monde entier, chaque pays ayant ses spécificités - des volutes les plus extravagantes à un style plus sobre qui tend au géométrisme et ouvre la voie au design graphique.
En rassemblant et en analysant près de 470 affiches, l'ouvrage d'Alain Weill ne perd jamais de vue l'époque où elles surgirent ni la singularité de leur foyer de production.
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