L'occupation allemande de la France en 1914-1918, qui toucha plus de
deux millions de civils, a été enfouie sous des mémoires concurrentielles.
C'est tout récemment qu'elle a revu le jour dans les travaux d'historiens.
Pourtant, ces études s'intéressent surtout à l'épreuve matérielle que subit
la population de la zone occupée, où le problème du ravitaillement finit
par dominer la vie quotidienne. Notre étude se propose donc d'explorer
les divers aspects d'une vie culturelle qui subsista malgré - et à cause
de - l'occupation allemande : littérature, théâtre, cinéma, musique et
sport ; l'enseignement et la religion. Pour ce faire, nous analyserons les
mémoires d'occupés, les oeuvres littéraires publiées pendant et (surtout)
après le conflit, la presse de propagande allemande et la presse clandestine,
aussi bien que les travaux de recherche récents qui commencent à mieux
éclairer l'expérience de ceux qui se trouvèrent «retranchés» derrière la
ligne de front. Puisque cette Première Guerre mondiale se présente souvent
comme une guerre dans le domaine de la culture, entre «barbarie» et
«civilisation», la culture est instrumentalisée en zone occupée comme
ailleurs. La culture peut servir à résister, à survivre, mais aussi à coexister
avec l'ennemi, voire à collaborer. Finalement, nous verrons comment la
mémoire de cette occupation méconnue s'inscrit avec difficulté dans la vie
culturelle française.
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