La sportivisation généralisée de l'espace public au sein de la
mondialisation capitaliste est l'une des expressions les
plus achevées de la chloroformisation des consciences.
L'omniprésence publicitaire du spectacle sportif, la prolifération
des violences, corruptions, dopages et manipulations biologiques,
l'instrumentalisation politiquement correcte de la fausse
conscience sportive («sport-culture», «sport-intégration», «sport-émancipation»)
représentent la substance même du sport-opium du
peuple, une propagande de masse véhiculée par tous les canaux de
l'industrie de l'amusement.
La tyrannie sportive que les divers despotismes, États
totalitaires et régimes policiers ont toujours choyée comme
une structure de contrôle politique s'est aujourd'hui affirmée dans
l'interminable série des circenses où se renforcent le populisme,
l'aliénation culturelle et la servitude volontaire. Les clameurs
du stade, les «ferveurs», les «passions» et les «vibrations»
sportives célébrées avec tant de complaisance par les idéologues
postmodernes, loin d'être une manifestation de la «démocratie
égalitaire», débouchent sur une nouvelle forme d'intégrisme :
l'intégrisme des foules vociférantes, du culte de la performance, de
l'abrutissement populaire par «la monstrueuse mécanique du
divertissement» (Theodor W. Adorno, Minima Moralia. Réflexions
sur la vie mutilée, Paris, Payot, 2001).
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