L'emblème de Paris
La tour Eiffel fut longtemps assez étrangère aux Parisiens. Phare d'une « Ville lumière » lors des fêtes et des expositions internationales, en sommeil entre-temps, Apollinaire la voyait en bergère des ponts sur la Seine. Pourtant, en élargissant le cadre, elle pouvait l'être du grand troupeau moutonnant des immeubles parisiens, si semblables et faisant le dos rond avec leurs toits mansardés (20 m de hauteur maximale, six étages : le gabarit imposé par le règlement d'urbanisme de l'époque).
Les provinciaux, les étrangers, eux, n'hésiteront pas à en faire l'emblème du Paris qu'ils fréquentent, celui des beaux quartiers aux belles perspectives et aux longs alignements d'arbres. Cette attraction foraine convertie en équipement permanent de plein air fut plébiscitée par les touristes parce que placée en pleine ville mais en un site dégagé et verdoyant, celui du Champ-de-Mars et de la butte de Chaillot. Tout visiteur reste étranger à la ville et ressent à un moment le besoin de changer d'air, de prendre quelque distance; la tour Eiffel est un refuge idéal.
La bergère est restée vaillante, même si son troupeau est mutant et le pâturage encombré çà et là du jeu de cubes de tours en habit de verre et toits-terrasses. Elle a traversé le XXe siècle sans dommage, avec de menues adaptations. Toujours support de lancement des feux d'artifice, elle n'a plus rien d'un phare cependant. L'implantation d'une antenne pour la télévision en 1954 portera sa hauteur totale à 320,75 m, mais entraînera la disparition de sa lanterne Terminale. C'est elle maintenant qui reçoit, la nuit, le feu des projecteurs. Ses ascenseurs d'origine ont été remplacés, notamment celui du dernier étage. Il monte maintenant d'un jet et fonctionne tout l'hiver. Fini le coup de vent à mi-parcours, la sensation du grand large, à défaut d'embruns marins ! Disparu le vertigineux escalier de service en colimaçon qui reliait les deux derniers étages ! Il a été remplacé par un banal, mais plus sûr, escalier de secours à volées droites. Un tronçon reste exposé sur la première terrasse.
La Ville de Paris en est propriétaire.
La deuxième concession d'exploitation venait à expiration fin 1979, au moment où la Ville de Paris sortait de son exception administrative de capitale pour redevenir une municipalité indépendante. La Ville de Paris est aujourd'hui le propriétaire-exploitant de son emblème, d'autant que sa gestion en est facilitée : avec le tourisme de masse, la tour Eiffel compte ses visiteurs par millions chaque année.
Quelque 35 tonnes de peinture protègent la Tour de la rouille pour sept ans environ. La couleur a varié au cours du siècle, passant de l'orangé au bleuté, et enfin au brun-beige de trois tonalités différentes (la plus foncée à la base, la moyenne au milieu et la plus claire au sommet). Les pigeons ont failli abattre l'inoxydable Géante. Leur fiente était parvenue à corroder certains éléments sur les faces intérieures inaccessibles aux peintres, ce qui rendit nécessaire une réfection complète, opérée de 1982 à 1985, avec remplacement d'assez grosses pièces. Toutes les pièces, fermement liées par rivets, constituaient un tout indéformable mais pas indémontable.
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