« Pour l'heure, les garçons étaient éreintés, abasourdis et fiers d'être devenus semblables à ces grands frères dont le nez est traversé d'une parure. En un instant, depuis l'aube, ils avaient quitté l'enfance et plongé dans un état second mêlant l'épuisement, la douleur, la stupéfaction et la crainte d'autres épreuves. Des cris avaient célébré leur « mort » et l'on promettait de les tuer s'ils parlaient aux femmes ou à leur mère, celle-là même qui les avait menés vers ce calvaire insoupçonné. »
En cinq semaines et plus de cent-dix étapes, les initiations des Baruya de Papouasie-Nouvelle-Guinée réaffirmaient le déséquilibre des rapports entre hommes et femmes et la compétition entre les hommes. L'imaginaire sous-tendant le rituel lui-même était également mis en actes. Ces initiations constituaient ainsi le pilier de l'ordre social. Par une description pas à pas de la cérémonie Muka de 1979 et une analyse mêlant l'anthropologie du rituel à celle des techniques, l'auteur montre que, dans un monde grouillant de forces invisibles et d'esprits, les actions matérielles sur le corps, recourant aux caractéristiques physiques de centaines d'objets, de gestes, de plantes ou de déambulations, participaient ,de manière spécifique à la métamorphose des initiés. Car même avec l'aide de leur « père » le Soleil, les paroles seules des Baruya ne suffisaient pas à extirper les jeunes garçons du monde féminin de leur enfance et à les métamorphoser en hommes accomplis et en futurs guerriers.
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