Nourritures halal et casher ont été montrées du doigt
comme «anachroniques» pendant la dernière campagne
présidentielle. Le cochon comme symbole d'une identité
nationale menacée a surgi dans les discours politiques, cristallisant
les sentiments nationalistes.
Dans cet essai original et stimulant, Pierre Birnbaum revient aux
origines de la question de la table partagée dans la République.
Faut-il manger les mêmes plats à la même table pour être de bons
citoyens ?
À l'époque des Lumières, Voltaire, Mendelssohn, l'abbé Grégoire ou
Clermont-Tonnerre en débattent gravement : les Juifs peuvent-ils
devenir citoyens alors qu'ils refusent bien souvent de consommer
du cochon ? La Révolution rêve d'une immense table fraternelle
où communieraient tous les citoyens et les républicains multiplient
les banquets. La question rebondit à la fin du XIXe siècle au sein
du monde juif en voie d'assimilation : faut-il renoncer à des rites
d'un autre temps pour entrer dans la modernité et participer à
la convivialité démocratique ?
D'une époque à l'autre, de la Révolution française à la IIIe République
et à Vichy, cette question peu connue a soulevé discussions,
incompréhensions, rejets et propositions, dans des termes qui
résonnent fortement avec les débats d'aujourd'hui.
Ce retour vers le passé permet de comprendre l'origine des visions
exclusives de la nation, mais aussi de redécouvrir les pratiques d'une
République qui a su se montrer ouverte aux accommodements.
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