Au milieu des années 70, la poussée des « nouveaux mouvements religieux », le retour en force de la religion sur la scène publique, la montée des « intégralismes » partout dans le monde provoquèrent une révision déchirante des théories classiques de la sécularisation. Après avoir mis l'accent sur la perte de la religion, on insistait sur la dissémination du religieux dans l'ensemble de l'espace social. Après n'avoir plus vu de religion nulle part, on découvrait du sacré partout.
Ce changement radical de perspective a placé durablement les sociologues en porte à faux : comment analyser en même temps l'effritement continu de l'emprise sociale des religions historiques et cette prolifération religieuse inattendue ? Les outils théoriques classiques se révèlent incapables de tenir compte à la fois de ces deux dimensions. Soit on définit la religion en fonction du contenu des croyances qui sont supposées la caractériser (par exemple, la croyance en une puissance surnaturelle), et on passe à côté d'un ensemble de phénomènes (des manifestations sportives de masse aux concerts de rock, ou aux « religions politiques ») dans lesquelles « quelque chose » se joue du « religieux » moderne ; soit on étend la notion de religion à tout ce qui, dans nos sociétés, touche à la question du sens et aux interrogations ultimes de l'homme sur la signification du monde dans lequel il vit, et on « noie » alors les phénomènes religieux dans la nébuleuse insaisissable des « systèmes de significations »...
L'objectif de cet ouvrage est de sortir de ce cercle en reprenant dans des termes renouvelés la question posée par les pères fondateurs de la sociologie, et abandonnée après eux, de la définition de la religion. L'auteur s'attache à l'élucidation de la modalité particulière du croire qui caractérise en propre le phénomène religieux : la référence à « une mémoire autorisée », c'est-à-dire à une tradition.
We publiceren alleen reviews die voldoen aan de voorwaarden voor reviews. Bekijk onze voorwaarden voor reviews.