Vers six heures du matin, le samedi 30 juin 1934, Hitler, revolver au poing, cerne avec un groupe de SS une pension tranquille où dorment encore ses camarades des premiers jours du nazisme : les chefs des Sections d'Assaut. Quelques minutes plus tard les SA ne seront plus que des traîtres, poussés au milieu des cris et des insultes vers les pelotons d'exécution. Roehm, leur chef, l'un des plus anciens compagnons de Hitler, sera abattu dans sa cellule par deux SS. Dans toute l'Allemagne, les assassinats et les exécutions se multiplient dans une atmosphère d'angoisse et de terreur. C'est la Nuit des longs couteaux, que Bertold Brecht dans Arturo Ui et Luchino Visconti dans son film Les Damnés ont traitée parce qu'elle évoque les grandes tragédies de Shakespeare.
Mais les faits vrais sont encore plus étonnants que les recréations artistiques. Et plus dramatiques. Max Gallo a consulté les archives, interrogé les témoins, parcouru les lieux de l'action. Il reconstitue heure par heure la Nuit des longs couteaux dans son déroulement authentique : l'atmosphère du régime nazi et de l'Allemagne de 1934 est restituée ; Hitler, Himmler, Goebbels, Goering, Papen, Roehm, la Reichswehr, les SS, les SA sont mis en scène et les intentions des hommes et des groupes rivaux sont démontées. Peu à peu le puzzle complexe qu'est une journée historique s'assemble, et c'est enfin tout le mécanisme du IIIe Reich qui s'éclaire. On comprend pourquoi Hitler, chancelier du Reich depuis janvier 1933, est contraint de liquider lui-même, l'arme à la main, comme un chef de bande et non comme un chef d'État, ses plus proches compagnons.
C'est bien, comme le dit Brecht, une " histoire de flammes et de mort ", à l'origine des autres tragédies. Car la Nuit des longs couteaux est le triomphe des SS et de Hitler. Une nuit de meurtres, une nuit médiévale s'étend sur l'Allemagne.
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