Concept protéiforme, la "nation", exprime une réalité diverse et inépuisable, qui résiste aux nombreuses définitions qui ont pu en être données, car une définition de la nation, est implicitement, une théorie de la nation, et, comme telle, sujette à débat. La diversité des points de vue ne doit cependant pas faire oublier que l'idée de nation s'impose quotidiennement à chacun de nous ; elle persiste dans le droit de la nationalité qui définit les critères d'appartenance nationale et modèle par là-même l'identité des individus. Or le droit de la nationalité, ou plus exactement, les deux grandes formes - jus sanguiis, jus solis - qu'il adopte, s'enracine dans deux conceptions fondamentales de la nation, la conception "française" ou "politique", et la conception "allemande" ou "ethnoculturelle".
La révolution française a investi la nation de la souveraineté politique ; l'assimilation entre citoyenneté et nationalité qui sous-tend cette conception originelle de la nation, élective et contractuelle, détermine l'arrimage de la nation sur l'Etat, symbolisé par l'expression d'Etat-nation. L'analyse de plusieurs modèles nationaux - Allemagne, Grande-Bretagne, Etats-Unis - met ici en perspective la spécificité du modèle français.
La nation, qui procède de la modernité démocratique, demeure la forme dominante du lien social. La nationalisation des sociétés a accompagné la diffusion du suffrage universel ; elle constitue une modalité de "l'atterrissage démocratique". Mais la construction européenne, qui tend à limiter la souveraineté des Etats, est-elle compatible avec le maintien du lien national ?
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