L'art n'est-il pas l'expression, à travers ses œuvres, d'une attitude fondamentalement immédiate, émotive, à l'égard des êtres, des situations et des choses ? Et ne demande-t-il pas qu'on l'apprécie de la même manière, c'est-à-dire d'abord par le sentiment ? - Sans doute. Mais l'évidence de la réponse à ces deux questions dissimule néanmoins un réel problème : quel est le rôle attribué à l'intuition, à cette «sympathie» de l'esprit dans le domaine de l'art ? L'esthétique du XVIIIe siècle s'était déjà interrogée en son temps sur ce rapport affectif - non inférentiel et non conceptuel - à certains objets, qu'il s'agisse de la nature ou de l'œuvre d'art.
La présente étude se propose d'élaborer une nouvelle signification de la relation intuitive que le public ou l'artiste entretient avec les objets d'art. Elle souhaite toutefois s'acquitter de sa tâche en tenant compte de l'irruption scandaleuse et bouleversante de ces objets tout faits - les ready-made de M. Duchamp - dans le champ artistique du début du XXe siècle. De telles œuvres sont en effet paradigmatiques de l'art que l'on dit «conceptuel», un art devenu entre-temps une tendance dominante dans la création des artistes contemporains.
En s'appuyant sur certains philosophes de l'art récents (Arthur Danto, Jean-Marie Schaeffer, Gérard Genette), de même que sur l'herméneutique de Hans-Georg Gadamer et de Paul Ricœur, la réflexion ambitionne de clarifier l'enchevêtrement de notions - l'intuition, l'esthétique, l'art - souvent mal comprises.
Cette clarification s'efforce donc de reconstruire le parcours auquel nous engage une œuvre d'art qui nous interpelle dans notre singularité. Elle amène finalement à penser ce parcours comme le lieu privilégié d'une double métamorphose : celle d'un simple objet et celle, plus radicale, de soi-même.
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