«Tu ne peux pas te fuir toi-même. Partout où tu te trouves,
ton adversaire est avec toi, l'ennemi est toujours dans ton
coeur.» C'est en ces termes que Cyprien évoque ce qu'il
appelle les blessures de la jalousie. Mais ce bref traité du grand
évêque de Carthage montre surtout que le sujet dépasse la
simple morale des relations quotidiennes.
Qu'un ange du plus haut rang se soit perdu jusqu'à devenir
l'Adversaire, le Diable, cela fut dû à la jalousie qu'il a conçue
quand il a vu que l'homme était créé à l'image de Dieu. Il a
voulu alors tenter et perdre l'homme. La première chute a été
fille de la jalousie et de l'envie, et combien d'autres ensuite !
Avec la jalousie, Cyprien s'avance hors des sentiers battus
de la morale antique. Lorsqu'il emprunte quelques idées à
Sénèque, il va les chercher dans un traité sur la colère. Mais le
remède à l'envie, c'est le baptême : les fils de Dieu peuvent-ils
vivre entre eux autre chose que la fraternité ? Telle est la
couronne, le combat véritable, quand la persécution s'est
éloignée. «La paix aussi a ses couronnes», proclame Cyprien.
L'exigence morale devient ainsi un défi spirituel.
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