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Jean Lartéguy est issu d'une de ces familles de paysans pauvres de la Lozère, dont on trouve les noms sur les monuments aux morts, pas dans les livres d'Histoire. Enfant, glacé d'horreur et fasciné à la fois, il a découvert la guerre dans une chambre fermée à clef, pleine de souvenirs de 1914-2018 : fusils, casques, poignards et, sur les plaques d'un stéréoscope, cadavres désarticulés, entassés « comme du linge sale ». Jeune homme, il n'a pas supporté la défaite ; il a rejoint les Alliés à travers l'Espagne et les prisons de Franco, s'est engagé dans les commandos, dont il a subi le dur entraînement. L'Italie, les Vosges, Belfort, l'Occupation de l'Allemagne. Plus tard, la Corée et l'attaque du Crèvecœur, comme lieutenant dans le bataillon de Montclar. Puis l'Indochine, cette fois en journaliste. Les trois guerres : la française, l'américaine, la vietnamienne. Pendant 25 ans. Jusqu'à la fin. Le Maghreb, le Moyen Orient, l'Afrique Noire, l'Amérique du Sud. La guerre, Lartéguy la connaît bien. À travers les récits de son père, voici celle du Chemin des Dames et de Verdun, cette succession de combats, dont la plupart, avec le recul, apparaissent comme d'inutiles et sanglantes boucheries, « l'affrontement têtu de deux états-majors imbéciles ». En fait, de 1918 à 1940 et de 1940 à nos jours, la guerre n'a pas changé. Non plus que la mentalité de certains chefs militaires. Rivaux envieux, mégalomanes, plus préoccupés de « faire du bilan », que d'épargner des vies humaines. « Une belle connerie, la guerre », aurait pu être le titre de cet ouvrage, fait de récits dramatiques ou drôles, de souvenirs émus, de réflexions, de portraits ; Leclerc, de Lattre, Bigeard, Guevara, Castro, le Vietminh, Israël… La guerre, aujourd'hui, est partout. Affublée de tous les drapeaux, en tête de toutes les croisades. Lartéguy nous la montre sans fard, penchée sur son énorme chaudron, où elle fait cuire ses philtres et ses poisons, NUE. Et il règle ses comptes avec elle.