Qu’est-ce qu’une frontière romaine, comment se construit-elle ? Quelles limites le pouvoir romain conçoit-il à l’étendue territoriale de sa puissance et de ses provinces ? Telles sont les questions que pose cet ouvrage à travers l’étude de l’une des frontières les plus étendues, et encore mal connue, de l’Empire romain. Il s’agit de la frontière d’Afrique proconsulaire, qui constitue la plus longue des limites provinciales au sud de la Méditerranée. Ce livre étudie sa phase déterminante, et encore discutée, de genèse entre la fin de la République romaine et l’étape ultime d’expansion de l’occupation militaire dans le Sud de l’Africa sous les Sévères. Cette synthèse montre, à la suite d’autres études régionales, que la frontière romaine revêtait des implications politiques et territoriales à l’échelle de la province et qu’elle ne fut pas conçue en fonction d’une politique stratégique à l’échelle de l’Empire, qui ne faisait d’ailleurs pas partie des desseins de Rome pour établir localement ses frontières. Ce livre invite également à réviser l’idée encore souvent véhiculée que la frontière romaine s’est construite en Afrique par rapport, voire contre une présence nomade régulièrement surestimée, conduisant à faire de la frontière une ligne tracée ou un espace défini par la présence militaire, dans un objectif de contrôle, entre le territoire romain et les tribus voisines réputées hostiles. La notion de frontière dans le contexte de l’Afrique romaine fut effectivement fortement influencée par la fonction militaire attribuée à un grand nombre de vestiges découverts dans le sud du territoire provincial. Les motifs justifiant la présence de l’armée romaine dans la région demeurent toutefois débattus. La question tout à fait centrale qui se pose est alors celle du nomadisme, puisque c’est autour de l’existence présumée de pratiques nomades ou semi-nomades que sont traditionnellement perçues les relations entre Rome et les populations locales africaines dans le Sud de l’Afrique romaine. Cette étude montre que la limite provinciale, dotée progressivement de structures militaires, ne constitua pas sous le Haut-Empire une frontière militaire institutionnalisée et prenant la forme de districts militaires ou administratifs établis. Telle n’était pas l’ambition de Rome, dont l’intervention dans le Sud de l’Africa ne répondait pas à un souci de pacification intégrale du territoire. Ce constat, qui n’est pas spécifique au contexte africain, explique aussi le pragmatisme dont Rome fit preuve dans les choix présidant à l’implantation des garnisons à la frontière provinciale, qui ne participaient pas elles-mêmes à une politique réfléchie d’occupation militaire systématique de la zone. L’examen de l’ensemble de la documentation, écrite et archéologique, conduit aussi à réviser l’idée d’un contrôle effectif et régulier qui aurait été opéré à la frontière de l’Afrique proconsulaire. Il permet en outre d’aborder sous un angle original la nature du peuplement dans la région, et de prendre la mesure de ce que représentait au quotidien la frontière provinciale pour les populations qui étaient établies à son contact. Ces différents aspects sont envisagés à travers trois parties successives, qui constituent l’armature de l’ouvrage. La réflexion est initiée par l’étude des circonstances ayant concouru à la formation de la frontière africaine, entre la fin de la République et le début du Principat. L’enquête vise à comprendre la nature des relations entre l’État romain et les populations locales dans le processus d’appropriation du territoire africain, progressivement soumis à Rome. Ce préalable indispensable permet d’envisager dans un deuxième temps les mesures politiques et les structures militaires organisant peu à peu la frontière provinciale sous le Haut-Empire. À travers l’examen critique des différentes manifestations de l’autorité romaine, à la fois en termes de décisions, mais aussi de constructions, l’enjeu est de mieux comprendre la gestion, ...
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