En l'espace de vingt ans, depuis l'entrée en fonction de Ronald Reagan
jusqu'à la fin de la présidence Clinton, le cinéma américain a considérablement évolué, épousant à sa manière le cours des mentalités du pays,
mais aussi les façonnant et leur imprimant ses formes. Miroir du
monde autant que transformateur culturel, donc, il a réfléchi et élaboré
le passage global des États-Unis d'une posture existentielle dépressive
à une posture mégalomaniaque. Entre la méfiance et le doute
caractéristiques des années 80 et l'euphorie triomphaliste des années
90, il est ainsi passé d'un extrême à son opposé. Mais il s'est surtout
appuyé en dernier ressort sur une vision paranoïaque des relations
humaines, au point de faire apparaître le « style paranoïde » comme
le trait culturel dominant du nouveau continent. Que ce soit dans Star
Wars, Independance Day ou The Matrix, voire même, sur un mode
différent, dans les films auteuristes de Martin Scorsese, Ridley Scott
ou Abel Ferrara, c'est toujours le même mal de vivre qu'on voit s'exprimer,
tantôt dissimulé par la frénésie d'une violence à fleur de peau ou mis à
nu par la noirceur apocalyptique d'un regard désenchanté.
Face à ces élans de déstructuration, pourtant, les écrans américains
dessinent parfois l'ébauche d'une résistance acharnée, minoritaire, sans
doute, mais plus vivante que dans bien des pays : la recherche
renouvelée du sens et la tentative de restaurer le lien entre les
générations se dressent en quelque sorte contre la froideur et
l'indifférence d'une société sans âme.
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