«"Être artiste, c'est échouer comme nul
autre n'ose échouer" : la phrase de Beckett
n'avait cessé de le hanter. Lire était une
recherche hasardeuse de quelque chose
d'informulé, d'inaccessible. Un roman
ajoutait aux mystères du monde, il ne
l'éclairait pas, n'apportait aucune solution
aux problèmes de l'existence.»
Quelque chose de ténébreux guide la main de l'écrivain Lester Godard.
Depuis les touches de sa Remington portative «qui crépite de poésie
beatnik et de Série Noire» jusqu'au volant de la Ford Mustang jaune dans
laquelle il est précipitamment monté pour fuir l'ennemi comme en 1940,
route d'Arras. Jusqu'au revolver Beretta dont l'ultime détonation aura
raison des erreurs d'une «Histoire» qu'il n'a jamais écrite. Car le drame de
Lester Godard, c'est bien d'être devenu, au fil du temps, la chose de cette
implacable critique littéraire aux pouvoirs de plus en plus déformants.
Et tandis qu'il fuit, la police aux trousses, c'est ce qu'il se répète : voilà ce
que je n'ai jamais été. «Ni dandy de droite ni esthète virtuose de gauche,
ni idiot utile ni révolutionnaire clandestin.» L'homme qui n'a vécu que
pour et par la fiction voudrait forcer les innombrables barrages du pays où
hélas, la littérature n'alimente plus qu'un jeu social sans surprises. Voilà ce
qu'il se raconte au moment de quitter la scène, dans le décor massacré
où continuent à osciller des 33-tours mythiques...
La cavale d'un homme seul, écrivain à part, à la fois excentrique et intègre,
déroulant le film d'une oeuvre tour à tour adulée, démolie et incomprise.
Un récit tout en résonances, vintage, très Nouvelle Vague années 1960,
subtil et caustique.
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