La réélection d’E. Macron a montré une France fracturée et où domine le vote protestataire. Pro et antisystème, mondialistes et souverainistes, populistes et élites, identitaires et progressistes... les lignes de front sont multiples. Sociologiquement il est admis de distinguer au moins un bloc populaire de droite (moins riche, moins diplômé, périphérique), un autre de gauche (plus urbain, plus diplômé, jeune) et un bloc élitaire (CSP, macroniens, libéraux, plus âgés). Mais culturellement, idéologiquement, nous ne sommes pas moins divisés : du destin de la planète à la consommation de viande, ou du risque de guerre à l’écriture inclusive, il n’est guère de sujets sur lequel nous ne nous déchirions. Or ces tensions idéologiques passent par les mots et par leur maîtrise. Donc par des vocabulaires disputés et des sémantiques en lutte.
Chacun tente d’imposer sa phraséologie, « woke » ou des luttes, jargon technocratique, terminologie droitière. Il est urgent d’analyser cette bataille des mots : comment ils s’imposent, se contestent mutuellement, se renforcent, deviennent des évidences pour les uns, des crimes par la pensée pour les autres. D’algorithme à wokisme ou d’autorité à zemmourisation, ce que l’on pense dépend de mots tabous et de mots totems.
Sur les plateaux de télévision, on dispute désormais du bon ou du mauvais usage d’amalgame, d’islamophobie ou de populisme. Sur les réseaux sociaux, toute allusion au racisme systémique ou grand remplacement vous classe dans un camp et vous désigne des adversaires. Analyser, comme dans ce livre, les mots qui servent d’armes ou de barrières, ceux qui contrôlent et ceux qui déstabilisent, c’est démonter l’arsenal des stratégies politiques et idéologiques.
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