J'ai presque peur, en vérité
De ses rencontres avec Nathanaël Duval allait naître l'origine de la phrase musicale qui met Swann dans tous ses états, une petite phrase qui enveloppe Swann, comme un parfum ou une caresse. Dans le roman, Duval était devenu Vinteuil, un musicien provincial, peu ou pas reconnu à son époque, que la fameuse sonate sortirait de l'anonymat. Et surtout, ce thème reviendrait inexorablement se mêler aux sentiments de Swann pour Odette, cherchant à imiter la nature insaisissable de l'amour lui-même. Avec quelle étrange ivresse Marcel Proust avait-il dépouillé Duval de son existence, confiant à Vinteuil le soin de faire passer seul le filtre obscur du son. Proust voulait dans son livre avoir le sentiment de véritablement entendre la musique comme il avait été saisi par la sonate de Nathanaël Duval.
Dans Un amour de Swann, Marcel Proust invente le musicien Charles Vinteuil à partir de plusieurs compositeurs de son temps. Comme pour tous les protagonistes de la Recherche, les exégètes de Proust ont cherché à identifier qui se cache derrière Vinteuil, mais Proust a lui-même brouillé les pistes en citant pêle-mêle Wagner, Schumann, Fauré, Saint-Saëns, Beethoven et bien d'autres encore.
La petite phrase de Vinteuil a fait couler beaucoup d'encre. De nombreux ouvrages, des colloques, des musicologues ont consacré leurs recherches sur le rapport de Proust à la musique, sans donner de piste fiable et définitive pour identifier le modèle de Vinteuil.
Ici, l'hypothèse Nathanaël Duval n'est qu'une pure fiction.
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