Eugène Le Roy (1836-1907)
"Le plus loin dont il me souvienne, c’est 1815, l’année que les étrangers vinrent à Paris, et où Napoléon, appelé par les messieurs du château de l’Herm « l’ogre de Corse », fut envoyé à Sainte-Hélène, par delà les mers. En ce temps-là, les miens étaient métayers à Combenègre, mauvais domaine du marquis de Nansac, sur la lisière de la Forêt Barade, dans le haut Périgord. C’était le soir de Noël : assis sur un petit banc dans le coin de l’âtre, j’attendais l’heure de partir pour aller à la messe de minuit dans la chapelle du château, et il me tardait fort qu’il fût temps. Ma mère, qui filait sa quenouille de chanvre devant le feu, me faisait prendre patience à grand-peine en me disant des contes. Elle se leva enfin, alla sur le pas de la porte, regarda les étoiles au ciel et revint aussitôt :
– Il est l’heure, dit-elle, va, mon drole ; laisse-moi arranger le feu pour quand nous reviendrons.
Et aussitôt, allant quérir dans le fournil une souche de noyer gardée à l’exprès, elle la mit sur les landiers et l’arrangea avec des tisons et des copeaux."
Jacques Ferral, dit Jacquou le croquant, raconte sa vie. Enfant, dans le Périgord, il a vu le malheur s'abattre sur sa famille, à cause du marquis de Nansac leur propriétaire. En grandissant, il n'a qu'une idée en tête : venger la mort de son père au bagne, celle de sa mère dans la misère et être libre...
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