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On a rassemblé ici les poèmes qui ont occupé Lescure depuis la publication des Drailles, il y a quinze ans. Il pouvait croire, alors, que les chemins où l'engageait l'exercice de la parole poétique déboucheraient sur une sorte de bienveillance de l'être. Les « poèmes carrés » témoignaient de la générosité des mots, justifiaient qu'on en interrogeât les pouvoirs. Ils n'écartaient pourtant pas les besoins qu'ils avaient d'un questionnement égal à leur succulence. C'était reconnaître leur fragilité et que, peut-être, la bonne volonté qu'on leur trouvait n'était que « l'enfant d'une nuit bitumée » comme dit Queneau. Les travaux de l'Oulipo ont aggravé cette mise en question du langage. Un autre recueil devra comporter les « exercices » que Lescure mène avec plus ou moins d'application (et qui feront l'objet d'un autre volume). Que le poème s'achemine vers sa destruction, qu'il cède à la tentation du silence, qu'il porte le poète à sa fin, constatant sa défaite quant à ses prétentions métaphysiques, l'a peut-être conduit à considérer dans le langage même le triomphe de la mort. Cependant, au cours de cet itinéraire, il est arrivé que la mort change de visage, et de menace qu'elle était, se fasse vaguement promesse. Ou sens. Lescure s'est surpris à retrouver ces temps-ci la présence obstinée de l'exercice du silence qu'il mêlait, il y a 40 ans, la liberté étant opprimée, à celui de la pureté.