Hôtes du langage, Paul Claudel, François Mauriac, Georges Bernanos et Julien Green le sont dans les deux acceptions, active et passive, du terme : ils habitent la demeure des mots par leur écoute des courants de sens qui circulent en eux, ils laissent transformer leur demeure intérieure par l'accueil de l'oeuvre d'autrui et d'une Écriture pour eux primordiale. L'irrigation de leur écriture par les sources bibliques constitue entre eux un évident point commun ; plus largement, en un siècle où la littérature se fait volontiers autotélique et où les signes n'ouvrent parfois d'autre piste que le réseau arbitraire de leur déploiement, ils ont en partage la conviction que les mots sont les instruments d'approche, incertains mais puissants, d'un sens qui leur est transcendant. À l'horizon de chacune de leurs oeuvres s'opère l'élaboration verbale d'un monde susceptible d'être investi par l'imagination et par la pensée : de l'une à l'autre se laisse suivre le creusement d'interrogations existentielles qui se font écho, aussi diverses que soient leurs voies d'expression, autobiographique ou lyrique, dramatique ou romanesque. Le rapport des quatre écrivains à la parole s'offre à contempler de façon privilégiée à partir de la limite, à la fois déroutante et structurante, que lui donne le silence. Il passe, en explorant les ressources de la pensée symbolique, à l'épreuve du défi que le scandale du mal adresse à l'intelligence. Mais il exerce aussi une action critique exigeante sur les soifs d'absolu que réfracte l'écriture. Conjuguant à l'ouverture de l'écoute une pratique féconde du soupçon, ces oeuvres invitent leur interprète à associer le processus empathique des herméneutiques phénoménologiques et la démarche critique des herméneutiques explicatives.
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