Le radicalisme est une tendance majeure de la vie politique française
contemporaine, un élément essentiel de la sensibilité nationale.
À l'origine fraction avancée du mouvement républicain, avec
Ledru-Rollin, il a joué un rôle déterminant dans l'édification de la
Troisième République à la fin du XIXe siècle. S'il n'a pas dirigé cette
dernière jusqu'au début du XXe siècle, il en a cependant forgé sa
doctrine et sa morale, au point qu'il a fini par s'identifier à la République
elle-même.
Cette identification, contestable si l'on s'en tient à l'exactitude des
faits ici rapportés, a entraîné l'attribution aux radicaux des grandes
réalisations républicaines (École publique, institution des libertés
publiques, constitution de l'Empire colonial) accomplies en réalité
souvent par leurs adversaires, sans eux, et parfois malgré eux.
Identifié à une République prospère, glorieuse et conquérante, le
radicalisme a, aussi, présidé à son déclin. Celui-ci commence avec
leur arrivée au pouvoir (à partir de 1902) et se poursuit durant tout
l'entre-deux-guerres, alors que les radicaux dominent le Parlement
et dirigent très souvent le gouvernement. Incapables de comprendre
les transformations d'un monde qui voue à l'obsolescence
leur modèle (Herriot en donnera une illustration éclatante), les radicaux
vont connaître un déclin politique continu que ne dissimulent
pas la figure d'un Mendès France, ou une importance
brièvement retrouvée sous la Quatrième République.
Yves Morel conclut ainsi son étude : si les radicaux peinent à
affirmer leur spécificité, c'est que la majorité des Français est
devenue radicale. Cette situation est à la fois leur faiblesse et leur
force.
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