Je ne l'aime pas, je le déteste, je l'abhorre, je le hais, je voudrais le voir mort,
j'exige que le souvenir même de son existence soit effacé à jamais... autant
d'expressions et de pensées, longtemps enfouies, disant le rejet, l'appel à la
vengeance et le rêve de destruction. Les discours et les gestes haineux prolifèrent
aujourd'hui. Ils ont pour cible une conjointe, un voisin, un adversaire politique,
une ministre, une communauté... Souvent appelée la passion funeste, la haine a
toujours existé mais elle possède une histoire. Ses expressions, ses modalités, ses
logiques, ses objets et ses effets ne sont ni identiques ni immuables.
Pour en rendre compte, il s'avère essentiel de retenir une séquence historique
«moyenne» située entre deux paroxysmes, la Révolution et Vichy, plus
précisément entre 1830 et 1930. Pour la caractériser, la fiction et les discours
savants se sont mis à la recherche de formules : sentiment destructeur, pulsion
puissante, émotion impérieuse, énergie libératrice et redoutable... Pour l'analyser,
il convient de croiser les ressources documentaires et historiographiques
afin de se demander comment la haine naît, se manifeste, se développe et parfois
est instrumentalisée, à une échelle interpersonnelle ou bien collective. Pour la
comprendre, dans une perspective d'histoire des émotions et d'histoire sensible,
il importe d'écouter les hommes et des femmes du passé afin de restituer des
paroles, des pratiques et des horizons d'attente.
Le présent ouvrage est un essai qui replace la passion funeste dans son époque
et cerne ses raisons évoquées par les contemporains. Si la haine est à sa manière
une forme de rationalité permettant de se mouvoir dans l'univers social, elle est
une «figure du pensable» et un ressort psychologique déterminant, donnant la
possibilité de comprendre ce qui anime les individus et les sociétés.
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