Fugues
Fuguer n'est pas chose aisée, tout compte fait. Il peut s'agir de fuir son domicile ou d'entreprendre une escapade sans conséquence. La fugue est également, bien sûr, une écriture musicale. Singulièrement, la suite des dessins de Marie Mirgaine apporte sa pierre à l'édifice de cette longue et savante histoire de la fugue. Comme en musique, les créations de Marie Mirgaine ont la rigueur d'une suite d'imitations ouvrant la voie à l'alternance d'un thème qui s'enchaîne à travers la reprise (comme on le dit d'un canon pour le chant) : reprise et répétition de couleurs, de formes et d'impulsions articulées les unes aux autres. Ainsi se consitutent des dynamiques, des trajectoires où chaque nouveau mouvement des personnages en fuite (en fugue) reprend certains aspects des mouvements précédents pour obtenir pleinement l'accomplissement de ses propres énergies. Et mieux encore, faisant également écho aux notions de jointures et d'ajustements, la fugue est une suite d'agencements, une combinatoire de parties : le propre même, à bien y regarder, des compositions dessinées de Marie Mirgaine dont la technique est d'ajuster, d'organiser, en les superposant les uns aux autres, des morceaux de papier de toutes espèces. À n'en pas douter, il s'agit donc ici d'un art (cet ars, cette habilité, cette technique) dont la signification repose en son fond sur les notions d'assemblage et d'organisation. D'un art dont l'objet, peut-être, serait d'échapper par la fugue (la fuite vers nulle part) à l'immobilité, pour mieux lancer un hymne à l'impulsion, à la poussée de la vie, dont le rythme relèverait à la fois de la pulsion d'un choeur et du battement du coeur.
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