Sigmund Freud était si profondément imprégné d'histoire ancienne et de littérature grecque que l'on peut définir la psychanalyse comme une archéologie de l'inconscient dont la méthode fut conçue sur le modèle de la philologie. Œdipe roi préfigure le «sujet de l'inconscient» et donne la clef de la «psychanalyse tragique». La fascination de Freud pour la Grèce antique n'était pas une exception. La plupart de ses contemporains ont trouvé dans la civilisation grecque une part essentielle de leur inspiration. S'interroger sur la dette des Modernes envers les Anciens permet de reconstruire le système culturel allemand et autrichien, dont Freud fut à la fois le parfait représentant et le critique lucide. Mais Freud a souffert, depuis l'époque de la Première Guerre mondiale, d'un grandissant «malaise dans la Bildung» néo-humaniste institutionnalisée à l'époque de Humboldt, dont Nietzsche avait analysé les contradictions. Les références à la Grèce ancienne avaient d'abord permis à Freud de se démarquer du genius loci viennois, baroque et romain. Son parcours ultime l'éloigne de l'Acropole et le ramène à la Loi sinaïtique. Ce n'est pas un retour au religieux, mais la recherche de nouveaux fondements de l'éthique et de la rationalité scientifique, à l'heure où la civilisation européenne s'effondre.
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