Francis Bacon et la réforme du savoir
Homme d'État adulé, puis contesté, philosophe tâtonnant et assez tard affirmé comme tel, Francis Bacon n'est certes pas un penseur ordinaire. Il demeure néanmoins, dans la « traditive » qu'il affectionnait tant, celui qui a su faire passer un message à la fois inscrit dans une récente tradition de renouvellement des humanités et dans une résolue et ambitieuse entreprise de réforme des savoirs, les deux étant à tout moment parfaitement complémentaires. Penseur d'envergure revendiquée, il n'hésite pas à déployer ses ailes et à annoncer sans vergogne l'avènement d'une certaine « modernité », ce qui - dans le vocabulaire qui lui est propre - se traduit par l'expression Novum Organum, hommage rendu à Aristote en même temps que volonté de s'en libérer et de bâtir du neuf sur de l'ancien, s'il est vrai que les nains juchés sur les épaules d'un géant représentent l'ascendance de la nouvelle génération sur l'ancienne, puisque leur regard portera naturellement plus loin quelle qu'ait été leur dette légitime vis-à-vis des illustres ancêtres. La vérité est fille du temps : fille de son temps sans doute ; mais, tout aussi bien, fille des générations qui l'ont précédée et l'ont ainsi formée : tradition, novation se trouvent inextricablement mêlées. Toute rupture suppose un héritage et l'on n'inaugure qu'en regard d'un legs. Toute velléité de rénovation, de réformation, de ré-instauration installée dans le projet d'une Instauratio qui ne saurait être que magna, rencontre dans la diversité même de ses interprétations ou traductions l'association de l'exigée projection vers l'avenir et de l'inévitable prise en considération d'un passé ainsi revu et corrigé.
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