Elle écrit un poème au dos d'une photo de Fortino
Sámano, due à Agustin-Victor Casasola. Lieutenant de
Zapata, faux-monnayeur, Fortino Sámano finit fusillé par
les troupes fédérales, exigeant de garder les mains libres et
les yeux sans bandeau, fumant, le dos au mur, son dernier
cigare. On a pu dire qu'il paraissait attendre sa fiancée.
(Une autre photo, non retrouvée, a été décrite : le peloton
va tirer, Fortino a ôté son chapeau, redresse le torse et dévisage
les soldats avec fierté.)
Il vient ensuite lire le poème. Ce dernier, de même qu'il
avait absorbé l'image, déborde sur la lecture qui se trans-forme
à son gré. Il se laisse déborder. Ensemble, ils tentent
de faire que poème et commentaire gardent chacun leur
indépendance, sans pouvoir, malgré tout, se séparer.
Ils seront donc partis d'une légende, comme l'épopée
part d'un mythe. Une légende : ce qui est à lire, ce qui doit
être raconté. Mais la légende du poème n'a que le sens de
son passage de l'autre côté de la langue. Quoi raconter de
cela ou de celui qui passe de l'autre côté ?
Ainsi, progressivement, le poème aura débordé dans la
lecture : il l'aura empêchée de gloser et l'aura obligée à
éprouver le gel singulier de la langue dans une image (dans
l'absence que l'image a ouverte).
La poésie est toujours intraitable : la philosophie doit en
attester.
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