Fille : dans ces quelques pages, serrées et vibrantes, une mère, Rahel Hutmacher,
face à sa fille, en une sorte de huis clos. Mais huis clos qui est ouvert
sur la nature, traversé par les vents et la neige, envahi par tout un bestiaire
mouvant. Ce «monde» est, réellement et apparemment, celui du conte. Et
Rahel Hutmacher ne se prive pas de jouer à la sorcière. Cependant, de
même qu'une sorcière n'est pas que méchante, qu'elle détient des savoirs,
pouvoirs et secrets transmissibles, de même, le conte «de fées», déjà dans
la tradition, n'est pas qu'idyllique. Et si Rahel Hutmacher s'entend merveilleusement
à jouer du merveilleux, c'est pour nous faire entendre,
comme par antiphrase, de quelles tensions, de quelles inquiétudes, voire de
quelles violences la relation mère-fille, immémoriale et ultramoderne, est
tissée, jusqu'au déchirement.
Dans cette prose, tout est bref : le livre entier, chacun de ses chapitres
qui sont autant de poèmes en prose, chaque phrase, chaque mot. Ce que
le lecteur retiendra sans doute au terme, c'est un certain rythme, unique,
inimitable, comme une respiration haletante d'attention et d'inquiétude.
C'est donc à une enfilade de variations musicales sur quelques motifs
désespérément obstinés que nous sommes invités.
C.B.
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