Un nouvel intérêt se manifeste en France pour l'œuvre de Max Weber. Des traductions récentes rendent enfin accessibles au public français des textes majeurs jusqu'alors ignorés, tandis que les questions qui traversent cette œuvre, celle des formes de domination, des logiques d'individualisation et de socialisation, des conflits de valeur, imposent leur actualité à une époque où l'expansion planétaire de certains types de rationalité d'origine occidentale va de pair avec la remise en question irréversible des représentations eurocentriques du sens. Le moment est venu d'une lecture philosophique, puisant aux textes et à leur commentaire érudit les moyens d'une reconstitution du programme scientifique wébérien, en le dégageant des mythes d'hier (la «sociologie compréhensive») comme des distorsions d'aujourd'hui (la «crise de la modernité»), également incapables de renoncer aux postulats téléologiques que Weber n'a cessé de critiquer.
Au fil de ses études, Catherine Colliot-Thélène s'y emploie en passant de la question des rationalités à celle des conditions historiques et à la genèse des systèmes juridiques. Instituant les confrontations nécessaires (Marx, Gierke, Schmitt, Elias, Wittgenstein, Habermas, Foucault), elle centre son alternative aux récupérations idéalistes de Weber sur trois concepts : contingence, conduites de vie, puissances de socialisation, dont l'ensemble fait de Weber le pionnier d'un nouvel universalisme sans fondation ni mission.
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