L'émouvant rapprochement entre les chrétiens et leurs
frères juifs, au-delà des péripéties tragiques et baroques de
notre époque, peut inciter les lecteurs des évangiles à retrouver
le bon usage de l'humour, si profond, si constant, dans
les moeurs et l'âme juives - afin de mieux retrouver et goûter
la saveur, piquante, poignante, des récits et des dialogues
retracés avec verdeur par les familiers du Christ.
On peut escompter, d'une lecture des textes saints selon la
clef de l'humour, outre une compréhension renouvelée, une
préparation à son application concrète dans nos vies quotidiennes,
affrontées à la complexité croissante d'un monde de
plus en plus brusque et imprévisible.
Car l'humour est décidément approprié, comme nous le
rappelait Kierkegaard, en vue d'assurer une contenance de
justesse et de vérité, sans crispation, dans les situations difficiles
et pourtant significatives. Il permet d'approcher avec
esprit les paradoxes et d'unir les contrastes, donnant de quoi
déjouer les pièges et les risques d'hypocrisie, ou même les
pires tentations. Il lui revient d'ouvrir l'accès à l'«incognito»
de Dieu.
Dans les plus extrêmes ou les plus familières des situations,
Jésus a donc donné clairement et obscurément, pour soutenir
ses disciples - et nous-mêmes - l'exemple, le modèle
mémorable d'une maîtrise chaleureuse de l'humour, surprenant
puis amenant à une ouverture libératrice. Il aide à relier,
intimement, universellement, la passion et la résurrection, le
fini et l'infini. Il convient spécifiquement au message inouï,
messianique, d'intériorisation, par lequel le Christ, au-delà de
la Croix et de la mort, nous révèle la proximité surprenante,
le Royaume, d'un Dieu d'Amour, Père.
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