Ébranlée par les Lumières et défaite par la Révolution Française, l'autorité d'une parole qui se voulait incontestable laisse place au débat démocratique où chaque voix devrait valoir autant qu'une autre. Revendiquant une énonciation singulière, l'individu moderne peut-il continuer de parler au nom des autres? Et selon quelles valeurs communes? Les écrivains des deux derniers siècles ont cherché les moyens de refonder la légitimité (politique, artistique) de la parole singulière, en articulant individu et collectivité selon un rapport dynamique, et souvent conflictuel.
Car le dilemme de la modernité qui s'exacerbe aujourd'hui semble parfois se résumer à l'affrontement de deux positions antagonistes: d'un côté, il s'agirait de ne parler qu'en son nom propre. D'un autre côté, se dirait inversement l'assignation de fait de toute parole au groupe dont elle est issue, comme si la prise de position individuelle devait forcément représenter ou trahir le milieu d'origine.
Ce livre collectif décline cette vaste question selon des perspectives croisées: des divorces de l'Histoire aux politiques de la parole qui en découlent, il s'agit de nouer les rapports nouveaux qui s'engendrent entre langue, autorité et collectivité. Et de voir comment la littérature la plus contemporaine continue de forger des modes inédits de délégation entre voix individuelle et expression d'une communauté à venir.
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