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Écrire la danse relève tout d’abord de la mimétique, de l’ekphrasis, de la description : il s’agit de saisir et de reproduire la nature spécifique d’un corps en mouvement, dans ses aspects extérieurs comme dans l’intimité d’un vécu original. La complexité est rehaussée par le fait de la multiple variété des formes de danse : danse populaire, danse de cour, ballet, bal, danse de couple. La description précise du mouvement des danseurs se heurte à des questions à la foi d’emplacement, d’espace, de temps, de rythme, d’enchaînement que la notation écrite peine à saisir. Les systèmes de notations qui permettraient de fixer sur le papier ces mouvements ont été nombreux, mais fort peu satisfont réellement ; ils ne sont la plupart du temps pertinents que pour une partie seulement de la danse qu’ils décomposent et sont peu aptes à rendre l’ensemble du phénomène. La trace écrite n’est que la stèle ou l’épitaphe d’un corps vivant ; elle ne produit que du mécanique, incapable de restituer pleinement la vie circonstancielle du corps dansant. Vouloir fixer sur le papier, à travers l’écriture, quelque chose qui se passe dans l’espace, dans le temps, dans et par le corps, les mouvements exprimant une projection expressive de l’intérieur vers l’extérieur, relève aussi d’une rêverie faite dans la distance, dévoilant l’écriture comme réminiscence ou volonté commémorative, acte de mémoire faisant retour pour une meilleure compréhension ou analyse, bref, exhibant dans la distance ce qui a été, l’écriture comme nostalgie, devant cette « tradition d’efforts singuliers et éphémères, qui disparaîtront sans laisser aucune trace, impalpable poussière de la plus périssable des architectures : la danse ». Mais l’écriture elle-même, dans ses métaphores et sa pratique, animée du mouvement comme ronde de la vie ou danse macabre, faisant place aussi bien au processus de civilisation qu’aux pulsions érotiques, s’exhibe également comme danse, mouvement dansant avec flexibilités, courbes, rythmes, vertiges, enchaînements, arabesques, graphé sautillante, serpentine, onomatopéique. Avec Nietzsche, Mallarmé, ou la chorégraphie derridienne, mais dans des sens différents, la danse est prise comme modèle d’une écriture, non pas dans l’imitation de son anecdote, mais de son essentiel mouvement.