Amiante, vache folle, sang contaminé, OGM : le risque écologique
et sanitaire est au coeur de nouvelles mésententes entre les
citoyens et les institutions. Il n'en finit pas de compliquer
l'exercice de l'action publique, de conforter la judiciarisation de
la société tout en fragilisant la paix sociale et la pérennité des
activités économiques. De là l'idée, souvent déplorée, d'une
aversion croissante des individus pour le risque, qui serait
devenu purement et simplement inacceptable.
Et s'il fallait plutôt voir là l'expression d'une légitime exigence,
la définition d'un mode efficace et responsable de gouvernement
? Alors que le XXe siècle s'organisait autour d'un contrat
stipulant que le risque serait acceptable à la condition qu'il soit
indemnisable, notre époque paraît ne plus se satisfaire de cette
fragile transaction. Il convient désormais de remodeler les institutions,
de concevoir les mécanismes de prévention et de précaution,
de préciser les procédures et les critères au regard desquels
un risque, qui s'avérera peut-être plus tard intolérable,
mérite aujourd'hui d'être couru. En somme, il s'agit de définir
les conditions auxquelles la gestion publique des risques est
acceptable.
C'est dire si l'exercice appelle une réflexion du droit sur lui-même,
sa fonction, ses techniques. Il invite à concevoir des solutions
pragmatiques, qui soient compatibles avec nos engagements
supranationaux (issus du droit de l'Union européenne
et de l'OMC). Il conduit à redéfinir sans angélisme la part revenant
à chacun - individus, entreprises, autorités publiques -
dans l'exercice de la décision comme dans l'attribution des
responsabilités.
À travers la question du gouvernement des risques, c'est en définitive
la légitimité même de l'action de l'autorité publique qui
est en jeu.
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