La France ressemble ces temps-ci à un Titanic dont l'équipage
irait droit vers l'iceberg, le sachant et le voyant mais ne trouvant
rien pour l'empêcher. Économique, sociale, démocratique,
européenne, culturelle, écologique : les crises s'accumulent dans
une confusion du sens et une perte de repères dont aucune force
ne semble capable de dénouer les fils, à l'exception des tenants de
la régression la plus obscure vers le plaisir de détester ensemble -
les Roms, les Arabes, les juifs, les étrangers, les femmes, les homosexuels,
le monde, les autres, tous les autres.
Nous ne sommes pas condamnés à cette fatalité. Urbaine, diverse
et mêlée, dynamique et inventive, la France telle qu'elle est et
telle qu'elle vit n'est pas conforme à cette image de régression, de
division et de repli. Mais, entre cette réalité vécue et la politique
supposée la représenter, le gouffre ne cesse de se creuser. Aussi la
crise française est-elle d'abord une crise politique, de représentation,
des institutions, une fin de régime. Celle d'une République épuisée,
à bout de souffle, impuissante et illisible.
Allons-nous subir ou réagir ? Ne nous revient-il pas, sauf à
définitivement accepter cette servitude volontaire des peuples qui
ne savent plus dire «non», de relever la France, dans la diversité de
nos attentes et de nos espoirs, en réinventant sa République, une
République enfin à l'image de sa promesse de liberté étendue,
d'égalité approfondie et de fraternité retrouvée ?
Dire non est un appel au sursaut, un sursaut démocratique et
social qui rassemble et conforte afin de trouer l'épais brouillard qui,
aujourd'hui, voile l'espérance.
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