Le "schisme luciférien", du nom de sa figure emblématique, l'évêque Lucifer de Cagliari, a troublé l'Occident entre 360 et 400, à la suite de la réintégration dans l'Église des évêques qui avaient peu ou prou cédé aux ariens, lors de la deuxième session du concile de Rimini, à la fin de 359. L'étude de cette crise est rendue difficile par la rareté, l'état fragmentaire et l'hétérogénéité de la documentation antique qui nous est parvenue. De plus, cette crise a été abusivement confondue avec le conflit qui, de 366 à 375, a opposé l'antipape Ursinus à l'évêque de Rome, Damase, car on a longtemps cru, à tort, que les lucifériens soutenaient le compétiteur de Damase, d'autant que ce dernier se trouvaient être lui-même la cible des schismatiques.
Deux œuvres principalement nous permettent de retracer aujourd'hui l'histoire du schisme luciférien: d'une part, l'Altercatio Luciferiani et Orthodoxi de Jérôme, un dialogue fictif, écrit entre 376 et 388, en Orient ou en Occident - on ne sait -, livrant non sans ambiguïté le point de vue orthodoxe; d'autre part, le Libellus Precum, une supplique probablement écrite à Constantinople et présentée officiellement aux empereurs Valentinien II, Théodose et Arcadius (383/384), par deux prêtres occidentaux Faustin et Marcellin, qui révèle, non sans partialité également, le point de vue luciférien. Tout oppose donc ces deux ouvrages: les auteurs et leurs intentions autant que le genre littéraire et leurs destinataires. L'un et l'autre œuvre de partisans engagés, il faudrait pouvoir les lire en parallèle. Des deux faces contrastées qu'ils offrent de la crise luciférienne, on trouvera ici le premier volet.
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